Cela fait une petite heure que je pédale en direction de la campagne, je m’arrête dans un beau paysage au pied d’un grand arbre. L’endroit est assez isolé. C’est l’automne, j’observe le jour décliner et je me dis qu’il me faut songer à repartir. Au moment d’enfourcher ma bicyclette, mon corps se fige, une très forte angoisse survient… Je suis déclenché. Mais à cette époque, j’ignore encore tout des mécanismes d’actions du TSPT. Néanmoins, je vais vivre à cette occasion, une double expérience initiatique. Voici la première : Comment trouver au-delà de la souffrance une aide, même quand tout semble désespéré ? C’est à l’intérieur de soi que cela se joue à l’endroit même où nous souffrons !
Attention ceci peut réactiver certaines personnes !
C’est comme un mauvais sort qui opère sans prévenir, pour une raison inconnue. Brutalement, l’angoisse apparait. Je cherche alors à tout prix une aide extérieure, une personne, un soutien, un réconfort quelconque… pour que cette « maudite » angoisse reparte… jusqu’à la prochaine fois. Cette récurrence incontrôlable m’affole ! Mes forces m’abandonnent, je suis comme vidé de mon énergie physique et mentale. L’idée même de devoir pédaler durant une nouvelle heure pour regagner mon domicile me semble terrifiante, insoutenable, épuisante.
Réactivation
Je reste là par terre, recroquevillé et figé. Nerveusement, je scrute alternativement mon vélo posé contre l’arbre et le chemin en quête de cet hypothétique sauvetage extérieur… En vain.
En boucle, de plus en plus rapide, je ressasse comment je vais faire pour me sortir de là. Le soleil, lui, continue de baisser à l’horizon. Le sentiment d’insécurité monte. L’angoisse s’installe. La sensation d’oppression et de brûlure s’installe dans ma poitrine.
Critique intérieure
Puis, comme si cela ne suffit pas, je me mets à me reprocher d’avoir pris mon vélo, « Pourquoi es-tu allé si loin ? » « Tu es vraiment inconscient, et maintenant qui va te sortir de là ? »
Avec ce type de comportement tourné vers l’extérieur, à la longue, j’avais fini par lasser toutes les personnes de mon entourage ! Ce soir-là, à l’évidence, personne ne viendra à mon secours.
Acceptation
Bien que très stressé et agité, je finis par accepter que je n’ai aucun autre choix : Vivant seul, il me faudra rentrer comme je suis venu. Mais comment sortir de l’angoisse, de l’asthénie et de la peur panique paralysante que suscite ma remise en chemin ?
C’est alors que la première idée me vient :
« Fais comme si tu devais faire juste un tout petit bout de chemin« .
Cette porte qui s’ouvre, me soulage d’une partie de mon asthénie. Me voilà reparti, très doucement ! Je sens que tout est fragile en moi ! J’essaie de me concentrer sur mes pieds, mes jambes et sur ce tout petit bout de chemin à réaliser.
Mais après quelques centaines de mètres, ma concentration s’évanouit, je suis trop fatigué et je remets pied à terre. Toutefois, l’essentiel est acquis, je suis de nouveau en chemin !
Au-delà de la souffrance, quelque-chose s’entrouvre
Ce que j’ai mis du temps à comprendre c’est qu’au-delà de toutes les approches thérapeutiques, il existe un joker que dans notre culture nous oublions très souvent. Nous sommes constamment encouragés à nous « battre contre ». Là où nous devrions en fait dire « oui et accepter ».
Il se produit alors ce que, le triple docteur en psychologie, philosophie et théologie, Jean-Yves Leloup évoque fort joliment :
“Je disais “non” et, tant que je disais “non”, la souffrance était insupportable. Puis je dis”oui”, et quelque chose s’est entrouvert, comme si au coeur de la souffrance on s’ouvrait à un lieu de nous-même qui ne souffre pas.”
Jean-Yves Leloup, 2021
L’acceptation c’est vraiment dire « oui » à ce qui nous fait souffrir intérieurement, sans cause évidente externe bien entendu. Si quelqu’un me maltraite, l’acceptation de mon mal-être dans ce cas-là n’est pas forcément la meilleure stratégie …
Et cette forme d’acceptation de sa souffrance est plutôt contre-intuitive et c’est sans doute pour cela que peu la pratique. C’est pourtant une excellente ressource !
Mais, je n’étais pas au bout de mes surprises, car la vie décidément très facétieuse, va me permettre de vivre une seconde expérience initiatique au coeur même de cette situation très pénible physiquement et psychologiquement. Nous l’aborderons dans le prochain post !