Marty, bloggeur américain, qui aide aussi les survivants de SSPT Complexe se disait intéressé de savoir comment je traverse le trauma. En anglais son expression est très poétique mais aussi très juste : « How to navigate trauma ? « . Littéralement « Comment naviguer le trauma ? ». Suite à mes précédents posts sur Guérir et Guérir comment ? Pour quoi faire ? Jusqu’où ?, j’aborde maintenant plus spécifiquement ce qui pour moi caractérise la guérison du SSPT Complexe.
Oui, il s’agit bien d’une « navigation » et comme j’aime beaucoup les métaphores maritimes, je dirais même que c’est une navigation en haute mer aux conditions météorologiques parfois salées (avec de sacrées vagues émotionnelles !), et assez souvent en équipage (famille, proches et/ou thérapeutes).
Comme l’a dit un jour le célèbre coureur d’océans Olivier de Kersauzon :
« Quand un bateau rentre au port, c’est que le bateau a été bon, que l’équipage a été bon, mais surtout que la mer l’a bien voulu. »
Olivier de Kersauzon
Si je poursuis la métaphore, pour guérir le SSPT, il s’agit bien pour moi d’apprendre à naviguer en équipage en haute mer et de se maintenir à la surface des vagues tout en continuant à faire route vers le prochain port. Au large, alors que le quotidien de l’équipage est prenant et que tout va bien, certains petits signes indiquent une dégradation météo à venir. Le marin aguerri sait les capter et va anticiper avec tout l’équipage comment poursuivre la navigation en toute sécurité alors même que le vent et les vagues vont forcir et que les manœuvres vont alors être de moins en moins faciles à exécuter. Ceci demande donc d’acquérir un certain entraînement avant de partir pour savoir quoi faire lorsque la tempête fera rage ! Mais pas de panique avec du temps, de la pratique et une aide avisée, on arrive à presque tout faire !
Dans cette navigation au long cours, qu’est la guérison du SSPT, il est utile de :
- connaitre et d’apprendre à identifier ce qui déclenche la réactivation de mémoires traumatiques (connaissances météo)
- accepter que cette réactivation, qui fait si peur, est en réalité une pure chimère ici et maintenant. Il n’y a plus de danger, seulement la mémoire d’informations « dysfonctionnellement » stockées en provenance du passé qui font irruption dans notre présent. Cependant comme notre cerveau n’est pas conçu pour gérer cela, il ne fait pas la différence entre ce qui est et ce qui fût. Cette chimère est malheureusement absolument convaincante pour lui. (Nuages et vent)
- comprendre que face à cette réactivation, notre mental va chercher à accomplir sa tâche habituelle à savoir de trouver des solutions pour revenir à quelque-chose de stable pour lui. Il va s’emballer et nous submerger de pensées et d’émotions qui vont s’ajouter à celles issues de la réactivation. (On finit ainsi par avoir peur d’avoir peur par exemple !) (Vent et vagues)
- savoir que notre ego va essayer de comparer ce qu’il connait et amener des pensées et des émotions de dévalorisation et l’impression que les choses se répètent. (Vent et vagues)
Il s’agit ensuite de recourir à une méthode que l’on aura pratiqué et fiabilisé avec le temps pour faire face aux réactivations qui ne manqueront pas de se produire comme les nuages et les vents.
L’objectif est bien de traverser la tempête et non de la combattre, de fuir, etc…
Du temps
Cette navigation au long cours réclame donc du temps pour :
- d’abord atteindre un minimum de stabilité émotionnelle et nerveuse, c’est là au début que le thérapeute est selon moi d’une grande aide pour soutenir, rassurer et enseigner tout ou partie des points ci-dessus. (Quand on sort en mer au début, on ne sort pas sans instructeur !)
- une fois cette stabilité améliorée, le cap suivant est de devenir l’observateur conscient de son esprit (Ce qui permet de moduler les vents et les hauteurs de vagues !)
- ensuite, mettre au point sa méthode de communication relationnelle avec son entourage afin d’éviter l’épuisement de l’équipage !
- enfin, rôder ses pratiques pour son Corps, sa Parole, et son Esprit jusqu’à en faire un nouvel … Art de vivre (maritime ?)
Mise à jour
Dernière mise à jour de cet article : le 13 mai 2024